Date de publication

5 juillet 2023

Auteur(s)

Raphaël Belleuf

Description

Contexte

Le texte suivant a été écrit dans le but d’accompagner le webinaire intitulé « Améliorer l’accès à la prophylaxie pré-exposition au VIH (PPrE ou PrEP) au Québec », qui a été offert le 14 mars dernier, dans le cadre d’un partenariat entre le PNMVH et Clinical Care Options, LCC (CCO). La rédaction de ce texte d’opinion a été rendue possible grâce à une subvention sans restriction à l’éducation de ViiV Healthcare.

Auteur du texte :
Raphaël Belleuf
Pharmacien,
Pharmacie Duquette

 

Principaux renseignements

Les pharmaciens jouent un rôle essentiel dans l’accès équitable à la prophylaxie pré-exposition au VIH (PPrE) ainsi que la sécurité des patients qui désirent la suivre.

Une véritable révolution

Cela fait déjà plusieurs années que l’utilisation du tenofovir/emtricitabine (TruvadaMD et ses génériques) comme PPrE a été approuvée par Santé Canada. Ce fû t une véritable révolution dans la lutte contre l’infection par le VIH et son utilisation s’est répandue sur tous les continents. Les données relatives au niveau de la protection que la PPrE apporte contre l’infection au VIH ont confirmé et même dépassé celles des études initiales : on parle maintenant d’une diminution du risque d’infection de plus de 95% chez les HARSAH (hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes) et les hommes et les femmes hétérosexuels qui suivent leur traitement de façon assidue.

Éduquer les pharmaciens

Bien que largement accessible au Québec, la PPrE peine encore à atteindre la plus grande partie de son public cible. Il est temps de s’interroger sur l’impact que nous, les professionnels de la santé, en particulier les pharmaciens, pouvons avoir sur l’accessibilité à la PPrE. C’est donc d’abord l’éducation des pharmaciens au sujet de la PPrE et de la santé sexuelle qui doit se poursuivre. En effet, l’usage de la PPrE s’est généralisé au Québec et le temps où les antirétroviraux étaient uniquement détenus dans quelques pharmacies spécialisées des grands centres urbains est heureusement révolu, donc les patients doivent pouvoir obtenir un conseil de qualité là où ils se trouvent. Par ailleurs, rappelons que la stigmatisation des problématiques liées au VIH demeure vive, les idées reçues sont nombreuses et constituent un frein à l’accès aux soins de santé. Pour beaucoup de patients, le pharmacien est la source d’information fiable la plus accessible. Ajouté au fait que les questions de santé sexuelle sont délicates à aborder, il pourrait suffire d’une interaction malheureuse à la pharmacie pour qu’un patient renonce ou retarde l’initiation de la PPrE. Faire preuve d’empathie et d’ouverture d’esprit sont aussi deux attitudes fondamentales.

Suivi du patient et autres considérations

De cette consolidation des connaissances sur la PPrE, en découlera une meilleure application des recommandations de suivi. Le pharmacien, lorsqu’il exécute une ordonnance de PPrE, doit s’assurer que le patient est suivi régulièrement par son médecin. L’un des enjeux est de s’assurer qu’il n’a pas contracté l’infection au VIH depuis la dernière visite. Le cas échéant, la poursuite de la PPrE pourrait compromettre les options de traitements futures en occasionnant l’émergence de résistance aux INTI. Mieux outillé, le pharmacien fera ainsi un usage plus éclairé de son jugement professionnel, par exemple dans le cas où une prolongation de prescription serait requise. Refuser de servir la PPrE, c’est potentiellement exposer le patient à un risque de contracter l’infection.

Il en va de même pour les considérations sur la santé rénale, souvent érigées en garde-fou d’une utilisation de la PPrE jugée à risque, mais qui s’avèrent disproportionnées par rapport à la réalité dans bien des cas. À cet égard, nos logiciels d’analyse d’interactions sont précieux, mais il faut savoir quelle importance accorder à chaque résultat. Et la présence d’antirétroviraux dans l’équation entraîne souvent une plus grande prudence de la part du pharmacien qui procède à l’analyse.

Enfin, l’arrivée prochaine de la PPrE injectable longue action promet d’élargir encore davantage l’éventail des interventions possibles pour les pharmaciens.

Le pharmacien, point d’accès facile et immédiat au réseau de la santé est, avec raison, considéré comme une source d’information fiable. La question de la PPrE ne fait pas exception, d’autant plus qu’il reste du travail à faire au niveau de la diffusion de l’information si l’on veut pouvoir rejoindre une plus grande partie de la population qui pourrait bénéficier de la PPrE.